

Comment l’opportunité d’aller courir dans l’hexagone s’est-elle présentée ?
KC : C’est un projet depuis plusieurs années de partir et de gravir les échelons, notamment depuis 2019. J’étais en pourparlers avec un club pro qui a une équipe réserve. On a beaucoup discuté mais ils voulaient que je vienne courir dans l’hexagone complétement. Les courses en Guadeloupe ne sont pas significatives pour eux donc il faut partir faire les championnats de France, les coupes de France, les classiques et, à partir de là, les discussions peuvent s’ouvrir. Ils veulent voir quelle est ta valeur sur des courses avec 120 ou 150 coureurs dans lesquelles la densité est élevée et le niveau plus compact. Si tu gagnes ou tu te classes sur ce genre de courses, là ils considèrent que tu es intéressant.
Au final, c’est le VC Lucéen du Président Christian FULBERT, guadeloupéen lui aussi, qui me propose un projet en double appartenance. Ce projet n’a pas abouti en 2019 à cause du contexte sanitaire mais l’horizon semble se dégager pour 2022.
Tu as déjà connu l’expérience d’un départ. Peux-tu nous en parler ?
KC : La première fois où on m’a sollicité, j’avais 17 ans ! C’est Denis Mathiasin qui était venu en Guadeloupe et en me voyant à l’entraînement, il m’avait proposé de partir. Il a alors contacté mes parents et mon club et après ça j’ai fait mon premier stage avec l’A.S. Corbeil-Essonnes. C’était ma première année de vélo donc j’ai tout découvert la même année. Dieu merci, ça s’est fait rapidement et ils m’ont proposé déjà à l’époque un fonctionnement entre Corbeil-Essonnes et la Guadeloupe.
Comment as-tu vécu ce départ à l’époque ?
KC : C’est la première fois que je partais loin de mes parents et sincèrement j’ai découvert un autre monde. Quand tu pars en vacances, tu peux partir seul. Mais quand tu pars pour le sport, il te faut gérer toute une organisation : l’alimentation, les entraînements, la récupération,… ça a été un changement important et c’était bizarre. J’ai tout de suite senti le manque. La famille et le club ici me manquaient. Ici, quand tu vas en course, on te prépare tout, tu es à l’aise. En métropole, ce n’est pas comme ça. Les clubs t’accompagnent en course mais c’est toi qui prépare tout : tes affaires, ton vélo, ton ravitaillement,… Là, c’est vraiment l’autonomie! Grâce à ces expériences, j’ai progressé et ça m’a donc rendu autonome très tôt.
Dans quel état d’esprit étais-tu à ce moment là ?
KC : Le premier départ s’est bien passé. J’étais plutôt excité à l’idée de vivre ça. Je suis parti avec des copains donc arrivés là-bas on s’est installés et le lendemain on a fait le premier entraînement. Je découvrais le froid sur le vélo. Je me disais « Waouh ! J’ai plein de linges sur moi, comment je vais faire ? » mais c’était une expérience de dingue ! Maintenant, j’y vais sans problème.
L’adaptation sur le plan sportif a-t-il été difficile pour toi ?
KC : Ça n’a pas été compliqué parce qu’en Guadeloupe j’avais déjà un rythme de travail assez soutenu. En arrivant en métropole, je me suis de suite entraîné avec les premières catégories donc, même si bien-sûr la charge d’entraînement été importante, je ne suis pas arrivé à zéro et j’ai pu m’adapter. Au final, je suis rentré en ayant pris du volume et de la caisse.
Comment s’est déroulée cette première tentative dans l’hexagone ?
KC : J’ai fait un premier stage pendant 2 mois ½, ensuite je suis revenu. J’étais sensé repartir pour d’autres stages mais il y a eu un souci à la fin du premier stage. On avait un suivi alimentaire et je ne l’ai pas respecté. Franchement, je ne vais jamais oublier ce jour. Lors d’un repas, je n’ai pas fait attention et j’ai pris des frites (rires). Personne ne m’a rien dit mais ils observaient au loin. Arrivé au briefing, ils m’ont « puni » pour me faire comprendre. Mon stage s’est arrêté là et je suis rentré en Guadeloupe.
C’était leur fonctionnement ! Pour eux, tu pouvais être le meilleur mais si tu ne respectes pas la discipline… Avec du recul, ça m’a servi, ça m’a appris la rigueur.
«Aller voir ailleurs pour grandir !»


Après cette première expérience, tu es aujourd’hui lié au Vélo Club Lucéen. Comment va s’organiser cette double appartenance ?
KC : Je vais rejoindre l’équipe de Nationale 3. Là, je vais partir en février pour les plages vendéennes, ensuite la première manche de coupe de France début mars. Ensuite, je reviendrai en Guadeloupe pour participer aux courses locales. L’idée c’est de courir les courses importantes dans l’hexagone et de garder un pied en Guadeloupe.
Après tes premières expériences, comment tu appréhendes le départ ?
KC : Franchement, ça va. Je ne me prends même pas la tête, je vais partir tranquillement pour un premier stage avec l’équipe histoire de renouer avec l’équipe (je connais la plupart du staff et des coureurs déjà) et de rencontrer les nouveaux. Le VC Lucéen c’est la maison pour moi là-bas. Je serai hébergé chez le Président donc ça va bien se passer. Mon club ici en Guadeloupe et mes sponsors me soutiennent aussi et m’aident à partir dans les meilleures conditions donc tout va bien. Merci à eux !
Tu as aujourd’hui 23 ans. Psychologiquement, la donne a changé. Comment vis-tu ce départ ?
KC : J’ai la chance d’avoir un entourage qui m’accompagne dans mon projet : ma compagne, ma famille et mes amis. C’est une chance car ils me poussent vers le haut. Ma compagne est prête à venir en métropole de temps en temps s’il le faut donc m’éloigner de ma famille ne me fait plus peur. Bien sûr les moments en famille le dimanche vont me manquer mais avec les nouvelles technologies on restera connectés.
Quels sont tes objectifs sportifs ?
KC : Mon objectif c’est de faire une bonne saison et pourquoi pas signer pro si l’occasion se présente. C’est vraiment un rêve d’enfant ! Tout le monde sait que c’est difficile mais signer dans une équipe continentale professionnelle l’année prochaine ça serait super ! Ce serait la récompense des efforts fournis depuis toutes ces années.
Quels conseils donnerais-tu aux jeunes à qui l’opportunité se présentera ?
KC : Avant de conseiller les jeunes, j’aimerai modestement conseiller les parents. Il y a beaucoup de parents qui ont peur de laisser partir leur enfant très tôt. Il ne faut pas avoir peur et faire confiance. Si un jeune est bon, il faut le laisser évoluer. Si ça passe par l’hexagone, il faut l’accompagner vers ça.
Pour les jeunes, je leur dirais de foncer et de ne pas avoir peur. Avec les nouvelles technologies, il ne faut pas avoir peur de s’éloigner de papa et maman. Ils seront là malgré la distance. Donc ne vous posez pas de question et faites au mieux pour réaliser vos rêves. Allez voir ailleurs pour grandir !
- Sylvain ZEQUES