Patricia Girard, la bombe estampillée Guadeloupe

Patricia Girard, la bombe estampillée Guadeloupe
Patricia Girard.

Vingt ans de carrière. Un chiffre assez incroyable quand on sait que, désormais, la durée de vie des athlètes s’est réduite à une dizaine d’années tout juste. Un chiffre incroyable quand on sait que l’adolescente se destinait à une carrière de handballeuse et n’était pas « très branchée » athlétisme. Pourtant elle l’a fait. Et celle dont on ne compte plus les titres est aujourd’hui à la tête de la « Team Patricia Girard ». Souvenirs.

Coach, formatrice dans les risques professionnels, même en dehors des pistes la Guadeloupéenne reste une femme active. Retraitée de la piste, elle n’en est pas moins à la tête d’une sélection de jeunes athlètes très prometteurs. La « Team Patricia Girard » a, un moment, compté parmi les plus grands espoirs de l’athlétisme français : Pascal Martinot-Lagarde, Ronald Pognon, Leslie Djone. Mais aujourd’hui, la championne se concentre sur les jeunes, un choix parfaitement assumé. « Je me suis aperçue que mon tempérament et ma rigueur ne collaient pas avec l’encadrement de ces athlètes de l’élite. Aujourd’hui, j’ai beaucoup de jeunes qui font les championnats de France et j’ai gardé quelques seniors. Ça me convient mieux, je m’épanouis plus avec eux.»

Sur la piste, ces jeunes l’écoutent avec attention, malgré un entraînement sans concession. « Ils ont toujours les yeux pleins d’étoiles quand on parle d’athlétisme. Je suis pour eux une deuxième maman. C’est l’éducation par le sport que je mets en place. J’ai fait du très haut niveau, je suis restée avec mon coach pendant 20 ans. Et c’est cela que j’essaie de transmettre. » Avec un peu de chance, ces jeunes engrangeront les souvenirs d’une carrière bien remplie, à l’instar de leur coach.

Les haies comme par accident

« Nous sommes aux Championnats du Monde en salle, à Toronto, au Canada, en 1993, c’est ma première médaille au 60 mètres haies. Je suis jeune et je commence à voir les grands champions. À la base, je ne faisais pas de haies. Ma vitesse de pointe faisait de moi une sprinteuse. J’avais essayé de passer quelques haies sans plus. Mais là j’ai su me qualifier. C’était une nouvelle expérience, j’y suis allée à la tronche. Car il faut le dire, je n’étais pas au point. J’ai dû travailler avec la rage, mon envie et ma détermination. Ça a été le début de la grande expérience. Car je me suis dit qu’il était temps maintenant d’aller chercher techniquement ce que j’avais arraché grâce à ma tête. »

Patricia chez les stars de la piste

« Jeux olympiques de Séoul, en 1988. C’étaient mes premiers Jeux. Je me retrouve aux côtés des plus grands. J’étais comme une enfant à la découverte du très haut niveau. Nous n’avions pas de grandes chances de médailles. J’ai donc découvert l’univers des Jeux olympiques et demandé à tout le monde un autographe, en passant par Gail Devers. Le seul qui n’a pas voulu m’en donner, c’était Carl Lewis. Je me souviens de ma tristesse, j’en ai pleuré. Mais je me suis dit que j’aurai une nouvelle occasion de lui demander et ça n’a pas manqué. En 1996, à Atlanta, je décroche le bronze sur le 100 mètres haies en battant Gail Devers. Le clan américain était déçu, et il y était. Je me suis approchée, je lui ai demandé un autographe. Quand il a sorti son stylo, je lui ai fait savoir que je n’en avais plus besoin et je suis partie. »

Les Antilles sur le toit de Paris

« En 2003, aux championnats du monde de Saint-Denis, à Paris avec les filles*, nous avions construit ce titre. Du début à la fin. Nous avions déjà la course en tête et nous avions cinq noms. Nous voulions inclure Marie-Josée Pérec, mais à cause de ses problèmes de santé, elle n’a pas pu participer. Nous voulions marquer l’Histoire, pour les Antilles. Pour ceux qui ne dormaient pas pour nous regarder courir. Avant l’épreuve, nous rencontrons les Américaines qui nous chambrent. « On va vous faire la misère chez vous ! » Elles ont réveillé les guerrières. On se regarde toutes en disant « On ne lâche rien ». Christine me dit « Patricia, ba yo gaz ». Et c’est tout ce que j’avais dans la tête. Dans le stade, il y avait des tambours, des djembés ; et à mon départ, mes foulées sont rythmées par cela. Je n’entendais plus rien. À la fin, c’est le record de France du 4x100m** et un titre de championnes du monde en relais. Guadeloupe/Martinique, c’est notre année. Nous avons fait ça ensemble et c’est une grande fierté. »

*Muriel Hurtis, Sylviane Félix, et Christine Aaron
**41s 78
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