Teddy Riner. © Bernard Boucard
Depuis la Grèce Antique et ses Jeux Olympiques, l’athlète a toujours été étroitement mêlé à des choses qui le dépassent. S’en remettant aux Dieux pour qu’ils l’aident à faire une bonne performance, il reste encore persuadé qu’elle n’est pas uniquement le fruit du travail. Entre superstitions et rituels, la performance sportive reste liée à la croyance.
Mystique est la Guadeloupe. Cette terre abrite, dans ses entrailles, des forces qui dictent le quotidien des Guadeloupéens. Le sport pratiqué sur le territoire en est donc indubitablement imprégné. Pour en revenir à l’origine des mots, « superstition » vient du latin « superstare » signifiant « protéger », et donc, pour le sportif, se tenir au-dessus de tout impondérable pour n’être concentré que sur sa performance. Au-delà du rituel, qui peut être d’enfiler sa chaussette gauche en premier, l’acte de superstition permet au sportif d’aller chercher une force le rendant capable de se sublimer. Le rituel lui permet de se concentrer, de rentrer dans sa bulle, de répéter mécaniquement les mêmes gestes, afin de libérer du temps de cerveau disponible pour déjà se projeter sur sa course ou son match.
L’exemple de Teddy Riner
Les moyens pour y parvenir sont divers. Cela peut être de mettre de l’alcali (ammoniac) dans les vestiaires afin de faire fuir les mauvais esprits, ou encore mettre de l’eau bénite sur le terrain. Ces attitudes ne sont pas endémiques à la Guadeloupe. Certains de nos sportifs évoluant dans le sport de haut niveau n’échappent pas à la règle.
Teddy Riner débute toutes ses compétitions avec la ceinture noire qui lui avait été offerte par son premier entraîneur. Véritable porte-bonheur ou illusion de l’esprit, qu’importe, puisque cela fait plus de dix ans que l’originaire de Vieux-Habitants n’a pas perdu de combat. Autre Guadeloupéen notable ayant un objet fétiche, Mathieu Bastaraud. Le rugbyman garde toujours avec lui une chaussette qu’il a portée lorsqu’il jouait dans son premier club, Créteil ; sa ville natale.
« Vae Victis »
La présence et l’absence de ces « porte-bonheur » ont tout de même un impact sur la carrière du sportif. On peut l’observer dans le cas du rugbyman Christophe Dominici. Ce dernier s’était aperçu en arrivant dans les vestiaires avant un match qu’il avait oublié un bijou porte-bonheur appartenant à sa défunte sœur. Il a fallu qu’un de ces amis parte en catastrophe chercher l’objet pour le lui remettre avant le coup d’envoi. Finalité, le Toulonnais marque l’essai victorieux dans les derniers instants du match. Ainsi, dans cette approche quasi mystique du dépassement de soi, il y a un parallèle plausible à établir entre le besoin des sportifs de sortir de leur condition réelle d’athlète et la réalisation de performances qui vont plus loin que leur réalité physique. Le dépassement de soi est-il donc à la portée de celui qui croit ?
- Romain Mattio